Où sont les fauves ?



lionNous nous trouvons au sommet d’une falaise de 600m de haut, au cœur d’une forêt de montagne. Quelques papillons multicolores dansent dans les taches de lumière que découpe le feuillage ; un bruit nous fait lever la tête, nous repérons un groupe de singes qui s’agitent dans les frondaisons. Devant nous s’étend une gigantesque caldeira volcanique circulaire où l’ombre des nuages court sur l’herbe rase et dorée. Bienvenue au Ngorongoro, un des sites les plus beaux et les plus riches en faune sauvage de la planète.

Notre guide Suédi nous explique avec un large sourire que nous bénéficions du massage tanzanien, sensation provoquée par les vibrations du 4×4 land cruiser sur les pistes. Nous supportons ces conditions, car nous voulons rencontrer le maximum d’animaux sauvages, surtout les grands fauves, les Simbas (lions en swahili).

Mais il y a un problème : c’est très difficile d’apercevoir les fauves ! 

Leur pelage est de la même couleur que l’herbe, ils sont le plus souvent soit endormis soit à l’affût, avec juste une oreille qui dépasse. Ils se déplacement régulièrement, donc impossible pour le guide de les repérer à l’avance. Il y a des kilomètres de pistes, et nous ne pouvons pas rouler vite, donc comment va-t-il faire pour trouver les coins intéressants ?

La première solution à laquelle je pense, m’inspirant des organisations performantes que je connais, est d’installer un PC logistique aux bureaux de la compagnie qui centralise l’ensemble des informations en temps réel et les retransmet aux autres guides. Problème : on est dans la brousse, le téléphone ne passe pas ! En outre, avec l’explosion récente du tourisme en Tanzanie, il y a des dizaines de petites compagnies de safaris, aucune n’a le moyen d’avoir l’information sur tout le territoire.

Les guides tanzaniens ont trouvé une solution simple, que j’ai appelée SIMBA : SafarI Mesh for Big Animals. En fait le seul outil de communication disponible est une CB hyper rustique, à travers laquelle le guide parle en permanence en swahili. Au début nous pensions qu’il discutait simplement de la pluie et du beau temps avec les autres guides. C’est vrai, mais seulement en partie. En fait, le premier guide qui trouve un fauve ou un animal intéressant l’échange à la CB avec tous les autres guides aux alentours, ce qui leur permet de venir rapidement sur place. C’est un système ouvert, puisque les guides de toutes les compagnies bénéficient de l’information. Il y a des règles très précises de comportement à l’arrivée sur site, pour que chaque voiture bénéficie à tour de rôle de la meilleure vue. Et ça marche !

Config-ToolsCette solution illustre un principe-clé du lean management : « Un personnel où chacun réfléchit, décide, agit et prend des responsabilités avec les autres et pour les autres  pour satisfaire le client ».

Chaque guide enchante ses clients en collaborant avec ses concurrents, par un réseau informel et horizontal d’échange d’informations. Autres bénéfices : le développement fulgurant d’une activité de tourisme performante en Tanzanie ; le développement de la seule industrie tanzanienne, qui est la conversion de véhicules 4 X4 standard en véhicules sur-mesure pour les safaris.
Ces véhicules sont presque tous des Toyota Land Cruiser, j’y reviendrai prochainement …

Où sont les fauves ?
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Vous pouvez me joindre par email, ou par téléphone au 06 49 13 20 38



Publié dans la Catégorie Philosophie Lean #1 : Implication des individus - 9 octobre 2013